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Bonjour Daniel tu es DC chez MC Saatchi GAD quel a été ton parcours ?
Étudiantle plus longtemps possible. Licence. Maîtrise. Doctorat de lettres modernes et civilisation pré-hispanique.

Donc parti pour être professeur ou Docteur ès pagnole, pourquoi lettres modernes et civilisation pré hispanique ?
Parce que le Droit m’ennuyait et que la Physique n’était pas à ma portée. Les lettres pour la littérature et l’espagnol parce que l’Amérique latine en général.

Comment as tu commencé dans la pub, par quelles agences est tu passé ?
TBWA , DDB, Australie, CLM/BBDO, Bates (DC), Grey (DC), BETC (DC), PUBLICIS (DC/VP), Leo Burnett (DC/VP)

Depuis combien d’années travailles tu dans le milieu de la publicité ?
Un bail, mais moins que les gens de ma génération, puisque j’ai commencé tard (1985)

Quels sont les gens de ta génération, avec qui as tu grandis publicitairement ?
En terme de génération,Tho Van Tran, Hervé Riffaut, Antoine Barthuel, Rémi Noël, Eric Holden, Jean-Michel Alirol, Arnaud Roussel, Anne de Maupéou, Anne-Cécile Tauleigne, Rémi Babinet, Altman, Carreño, Robin de Lestrade, Bertrand Pallatin…
Et d’autres qui ont disparu du marché avec les restructurations, ou par lassitude.

Tu as hésité a faire de la pub ? Qu’est ce qui t’as donné envie d’en faire ?
C’est l’époque qui m’a donné envie. J’avais été prof, mais c’était un prétexte pour vivre à l’étranger, et journaliste mais il y avait trop de chômage en France. La publicité permet (permettait?), comme le journalisme, de s’intéresser à plein de choses et de gens différents, un camembert, une voiture, un réalisateur, une banque, un photographe, un ordinateur etc.…

Tu trouves qu’actuellement le métier ne le permet plus ?
Il le permet si le créatif en a la volonté. Il y a toujours des gens curieux. Avant, ça faisait partie de la démarche en agence de connaître le produit, on t’envoyais à l’usine Wolkswagen en hiver à Wolfsbug, à côté du rideau de fer, ou dans le pays d’Auge voir comment on moule les camemberts à la louche. Il y avait aussi du temps pour s’intéresser aux sujets. Quelqu’un qui sortait une campagne de trois annonces, on lui fichait la paix pendant trois semaines ; c’était le repos du guerrier. Pas de Time-sheet, pas d’HEC à la tête des boîtes (je travaille avec un HEC…). Il y avait plus d’argent aussi, et donc la publicité attirait plus de talents, et de gens moins « formatés ». Comme pour le tennis, c’était plus rigolo de voir un match Mac Enroe – Connors, que Federer – Nadal.

Tu travailles avec qui et sur quoi chez MCSaatchi GAD ?
Ayant fondé l’agence avec Antoine Barthuel et Gilles Masson, je travaille dans le même bureau qu’eux. Sinon je travaille avec tout le monde dans l’agence et sur tous les budgets.

Pourquoi avoir crée une agence ?
Pour ne plus avoir quelqu’un qui me dit ce qu’il faut faire, un type qui débarque de l’avion et qui explique qu’il faut licencier tant de personnes parce que le réseau a perdu tel gros client au Danemark, ou qu’on ne peut pas faire telle ou telle chose pour telle ou telle raison, pour ne pas soupçonner mon Président de vouloir me remplacer par quelqu’un de moins cher, ou de plus drôle ou de plus jeune. J’ai monté mon agence pour avoir des clients qui me choisissent et non qui pensent « Ce gars-là est un mercenaire, il sera parti dans deux ans, il n’en a rien à faire de ma marque ».
C’est aussi pour arriver au travail le matin en me disant que tous les gens qui sont dans l’agence je (pas moi tout seul évidemment) les ai choisi. C’est aussi une histoire d’amitié avec Barthuel et Masson. On a travaillé ensemble à deux ou à trois chez BETC, BBDP, Publicis, Leo Burnett, Australie, Grey, Bates. Ce n’est pas courant. Il n’y a pas beaucoup de boy’s band qui ont notre longévité.

Parles nous de deux trois choses que tu as faites en pub qui t’ont marquées :
J’ai fait plein de chose qui m’ont marqué et deux ou trois qui ont marqué les autres. J’ai rencontré Dick Fossbury chez lui et sa femme a ressorti ses vieilles pointes de son saut à Mexico en 1968, et ensuite on est allé dans la maison où s’est suicidé Hemingway, Philippe Michel m’a reçu chez lui dans un peignoir de bain plus sale qu’une serpillère et j’ai dîné avec Maurice Saatchi à qui on dit « Welcome my Lord » quand il arrive au restaurant en Angleterre. Sinon, dans les choses que j’ai faites moi même comme créa je dirais que « Think Different » est la plus connue, même si la signature n’a eu de succès que lorsqu’elle a été revendue par BBDO à Apple. Cette année nous avons fait un long métrage avec Benicio del Toro, Kusturica, Gaspard Noé, Laurent Cantet et d’autres à La Havane. Sortie en salles 2012.

« La Banane », c’était une envie de faire des accroches sans mots (avant le truc des Seychelles de Vervroegen), et c’est un produit génial à mettre en grand dans la rue. c’est aussi le premier lion français à cannes en affichage (année d’ouverture de la catégorie).

« Toyota », c’est une démarche journalistique. comment émerger en simple page et « obliger » les gens à lire des infos sur la marque, alors prisonnière de la fameuse « japanese box ».


Tu fais quelque chose en parallèle de ton métier, des passions ?
J’écris. Une pièce de théâtre et deux romans. je travaille sur un 3ème roman. J’aime voyager, j’aime rouler en moto et je ne désespère pas de passer ma ceinture noire de Tae Kwon Do l’année prochaine.

Des romans, sur quel thème ? on peut les lire ? la pièce de théâtre ça parle de quoi ? Tae Kwon Do sérieux ?
Le livre, c’est une pièce de théâtre qui s’appelle « Nelson et Georges », c’est un dialogue entre un homme et son chat sur la place de l’animal dans la société et dans l’Histoire, sur l’ethnocentrisme et l’anthropocentrisme. L’homme tombe amoureux d’une femme allergique aux chats. Qui va-t-il choisir ? C’est chez Ipsa Editore, et il faut comprendre l’italien pour le lire (sinon, j’ai repris le thème dans la revue « Bordel » cofondée par Beigbeder et Stéphane Millon (numéro « Desproges » 2011).

Le premier bouquin est un roman avec une contrainte formelle : » Un mort par page » chez Robert Laffont , mais c’est une histoire. Le deuxième c’est « Prière de laisser ses armes à la réception », chez Robert Laffont aussi, l’histoire d’un gérant d’hôtel bas de gamme (à peine une étoile) et de ses clients. Le troisième, je suis dessus, ça parle de Maracaibo, une ville de pétrole et de trafics à la frontière Vénézuela-Colombie, où j’ai travaillé pendant 3 ans.

Pour le Tae Kwon Do, évidemment c’est sérieux. Mon prof s’appelle Olivier Sicard, et il est vice-champion du monde de casse (les briques, les planches, ce genre de truc) ; titre obtenu en Corée, là où on rigole pas avec les arts martiaux. Il y a des vidéos de lui sur Youtube.

Dans ton métier quel est ton meilleur souvenir ? et le pire ?
Le pire c’est une réunion près d’Orléans avec un sale type qui dirigeait la marque Monsieur Bricolage ; il est allé en prison quelques temps plus tard pour harcèlement ou un truc dans le genre. Le meilleur, je ne sais pas, il y en a beaucoup.

Le truc qui t’a fait le plus halluciner ? que tu pensais pas faire un jour ?
Gagner le budget Havana Club (Pernod Ricard), contre BETC, Ogilvy, etc. avec Antoine et Gilles sans avoir ni cartes de visite, ni locaux, au tout début de l’agence. On était juste trois et on travaillait au café.

Quelle sont les pub qui t’ont le plus marquées ? que tu aurais aimé faire ?
Il y en a des tonnes. Tout Bernbach, pour commencer.

L’annonce Harley Davidson qui dit : « Somewhere on an airplane a man is trying to rip open a small bag of peanuts ». Le visuel c’est un type en moto sur une route dans un paysage sublime.



Si tu commençais la pub aujourd’hui, tu irais ou ?

En Argentine, au Brésil…

Tu vois quoi comme changement depuis tes débuts ? Et tu penses que le milieu va évoluer de quelle manière ?
Les changements sont immenses, d’un point de vue techno, économique, média etc. Mais la résultante de tout ça c’est que je ne connais personne qui me dise « Dans l’agence où je suis, on se marre bien ».

Tu as des modèles de créatifs ? des gens qui t’inspirent ? pourquoi ?
Qui m’inspirent non, mais que j’admire oui. Je dirais Dominique Marchand essentiellement pour l’ensemble de son œuvre 🙂